...vous adorerez les Alt-A!
Voici la traduction faite par mes soins d'un article de the Economist paru le 5 Fevrier 2009. Un résumé en deux mots : c'est cuit.
Article original : Move over, Subprime.
Pousses-toi, Subprime
Aujourd’hui, des américains plus aisés sont en défaut de paiement sur leurs prêts.
L’époque où ce qui empêchait les banquiers de dormir était les hypothèques subprimes est depuis longtemps révolue – uniquement à cause des explosions en chaine à tous les niveaux dans la finance. En termes de toxicité, cependant, les subprimes n’ont eu aucun équivalent. Jusqu'à aujourd’hui, peut-être. Même si les marchés de crédits, particulièrement les marchés de crédit d’entreprise (corporate-debt), montrent quelques signes d’amélioration, la situation des prêts hypothécaires consentis aux Américains supposés plus aisés se dégrade à un rythme effroyable.
Particulièrement inquiétants sont les prêts hypothécaires “Alt-A”, proposés aux emprunteurs coincés entre le grade subprime et prime. Ce marché à été présenté comme un moyen d’étendre l’accès à la propriété à ceux qui, comme les travailleurs indépendants, ont une bonne solvabilité mais des revenus fluctuants. Ses fournisseurs se sont spécialisés dans des offres de prêts accompagnés de minces brochures et de pratiques exotiques comme les hypothèques à amortissement négatif, qui permet aux emprunteurs de payer moins que les intérêts, la différence étant ajoutée au capital restant dû.
Que les Alt-A aient des problèmes n’est certes pas une surprise. L’été dernier, par exemple, ils ont participé à mettre à bas IndyMac, une banque californienne. Mais la vitesse à laquelle ces prêts se sont dégradés ces derniers mois, et la réaction des agences de notations, furent saisissantes. Les impayés ont explosé dans les derniers mois de 2008. Ils ont même augmenté fortement pour les prêts contractés en 2005, avant même que la dégradation des notes devienne aussi fréquente (voir graphique).
Les agences de notation courent pour tenter de rattraper cette réalité morose. Moody’s, qui l’été dernier à publié une étude très optimiste sur les Alt-A, a récemment quadruplé ses projections de pertes sur les titres adossés sur te tels prêts. Un flot continu de dégradation de cotations qui est devenu une véritable inondation ces dernières semaines, avec des milliers de tranches Alt-A buvant la tasse. Les chutes ont été inhabituellement brutales : sur les 59 milliards de $ de sécurités notées AAA entre le 29 Janvier et le 2 Février dernier, un surprenant 91% d’entre eux ont été directement changés en « Junk », d’après Laurie Goodman de Amherst Securities. En termes de notations, Alt-A fait pire que les subprimes.
Pour Moody, c’est “sans précédent”. Ce qui a le mérite d’être clair. L’agence s’attend maintenant à des pertes pour les titrisations Alt-A 2006-07 de l’ordre de 20%, comparé à une moyenne historique nettement en dessous des 1%. Comme un affreux écho du fiasco sur les CDOs (collateralised-debt obligations), les créanciers du bas de la structure peuvent s’attendre à des dépréciations totales de ces actifs, tandis que la vaste majorité des créanciers prioritaires (senior holders) ne sera pas à l’abri de substantielles pertes.
Les sommes en jeu sont désespérément importantes. Dans le pire des cas, les pertes portant sur les 600 milliards de $ de dettes Alt-A titrisées encore à payer pourraient s’élever à 150 milliards de $, admet David Watts de CreditSights, une entreprise de recherche. Des analystes de Goldman Sachs estiment possible des pertes sur les 1.3 trillions du marché total des dettes Alt-A – incluant les crédits titrisés aussi bien que non-titrisés – de l’ordre de 600 milliards, presque autant que les pertes attendues sur le marché des subprimes. Ajoutez à cela les option-ARM, un genre particulièrement virulent de prêt a taux variables, beaucoup d’entre eux étant de même essence que les Alt-A, et le chiffre potentiel atteint les 1 trillion.
Une part du problème provient du fait que les Alt-A sont apparus a la toute fin du boom du crédit fin 2006 et début 2007. A l’époque, les subprime avaient déjà mauvaise réputation. C’est alors que Wall-Street a mis au point une combine : il prit des emprunteurs qui auraient dû en temps normal être subprime et les a maquillés en «mid-prime ». Beaucoup de ces prêts étaient condamnés d’avance. D’après la Bank for International Settlements, un incroyable 40% des prêts hypothécaires contractés au cours du premier trimestre 2007 étaient des prêts «interest-only» ou à amortissement négatif.
En théorie, la baisse des taux d’intérêts durant l’année passée devrait amortir le « choc de remboursement » subi par les emprunteurs dont les prêts furent réajustés de taux d’appel bas à des taux plus élevés. Mais le prix de l’immobilier a chuté si abruptement que peut-être la moitié de tous les emprunteurs Alt-A sont en negative-equity ; pour beaucoup d’entre eux, abandonner leur bien semble être la meilleure option. De plus, les emprunteurs option-ARM qui ne s’attendaient pas à devoir repayer le principal avant 2015 ou plus tard pourraient maintenant être contraints à le faire dès cette année, car ils atteignent des plafonds qui déclenchent le remboursement prématurément. Les efforts du gouvernement pour contenir les saisies devraient aider ces malheureux, bien qu’ils devraient faire bien peu pour les détenteurs de bons adossés à des hypothèques, qui eux pourraient faire face à des pertes plus importante du fait des « cramdowns », c'est-à-dire quand les cours spécialisées dans les faillites imposent une réduction du capital restant dû.
Alt-Aaaaaargh
La douleur sera ressentie par toute l’industrie de la finance. Les sociétés d’assurance, qui ont absorbé un important mais inconnu nombre de créances remplies de Alt-A, seront désormais poussées à vendre dans la mesure où elles n’ont pas le droit de détenir des titres notés en dessous de « investment grade ». Les banques ont déjà vendu une part importante de leurs actions Alt-A aux hedges funds et autres compagnies d’asset-management, souvent avec d’importantes décotes. L’exposition de UBS à baissé de 26.6 milliards de $ à tout juste 2.3 milliards, par exemple. Mais d’autres banques européennes n’ont pas été aussi zélées. ING, une banque hollandaise, détient toujours 27.7 milliards d’euros de dette Alt-A. Les banques américaines sont assises sur peut-être 800 milliards de $ de ces titres.
Alors que la valeur des titres hypothécaires a chuté, les banques ont du vendre leurs avoirs, subissant des pertes « non-réalisées » qui ont érodé le montant de leur capital. De nouvelles vagues de dépréciations augmenteraient d’autant la pression à la baisse sur les prix. Ces dépréciations attaquent le capital également d’une autre manière, car les dettes de niveau « junk » portent une lourde pénalité de risque ; les banques doivent en effet mettre de coté cinq fois plus de capital qu’elles devraient le faire pour d’excellentes valeurs. Dégrader les notes affecte également les prévisions de bénéfices, en poussant les banques à admettre que les pertes classifiées comme temporaires sont désormais permanentes.
Les plus fragiles d’entre elles pourraient désormais avoir besoin de lever des capitaux frais. Si elles ont de la chance, les banques pourront transférer une part du risque aux gouvernements par des garanties d’actifs ou des « bad banks » qui assumeraient ces actifs nocifs. Le gouvernement hollandais a accepté d’assumer le risque de la plupart des valeurs Alt-A de ING, et l’exposition de 11.4 milliards de $ de Citigroup aux bonds Alt-A tombe sous la garantie qui est partie intégrante du plan de sauvetage de Novembre dernier.
Ce que le contribuable obtiendra en retour est loin d’être clair. Les officiels sont encore en pleine lutte pour savoir comment évaluer les hypothèques dépréciées. Estimer la valeur des prêts Alt-A peut être particulièrement difficile car ils sont terriblement hétérogènes, à cause d’un large assortiment d’options de remboursement. Les banques les moins rigoureuses détiennent certains actifs à environ 60 cents par dollar. Ceux de Morgan Stanley sont cotés à la moitié de ce montant. Son cours a rebondi récemment, en partie dans l’espoir que le groupe sera dans la mesure de comptabiliser (write-up) ces actifs une fois que le gouvernement aura dévoilé son plan de sauvetage.
Les plus grands perdants dans cette affaire de Alt-A sont les agences gouvernementales d’hypothèques, Fannie Mae et Freddie Mac. Ils ont se sont aventurés sur le marché en 2006-2007, flairant les bonnes affaires dans les états les plus enfiévrés d’immobilier comme la Californie et l’Arizona, confortés par des versement d’acomptes de 20%. Lorsque la baisse des prix de l’immobilier à dépassé ce montant, ils se sont retrouvés à détenir les premières pertes, les emprunteurs ayant emprunté avec un tel acompte n’ayant pas besoin de contracter une assurance hypothécaire.
Aussi gangrenés que les Alt-A paraissent, le pire est peut-être encore à venir. Alors que le chômage aux Etats-Unis se dirige vers les 8%, même les prêts les plus garantis se dégraderont. Les banquiers deviennent de plus en plus anxieux au sujet des 1.1 trillions de $ de prêts hypotécaires et valeurs « prime », dont ils détiennent personnellement la majeure partie, assumant qu’ils sont à l’épreuve des flammes.
Ceux-ci sont estimés dans leurs comptes à une valeur « beaucoup plus optimiste » que les hypothèques moins bien notés, d’après l’un d’entre eux. Quelques 70% des valeurs « prime » finiront tôt ou tard par voir leur note dégradée, d’après un « downgrade-o-meter » publié par JPMorgan Chase. Ainsi que l’explique Guy Cecala de la newsletter Inside Mortgage Finance : « La première vague de la tempête des hypothèques étaient les subprime. Maintenant nous sommes frappés par les Alt-A. Mais une plus grosse vague se profile à l’horizon, et elle englobe tous les types de prêts.»
(Traduction publiée en premier lieu sur le forum bulle-immobiliere.org le 05 Mars 2009)
mardi 24 mars 2009
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Voilà typiquement le genre de produits financiers situés entre les subprimes et les primes, et que l'on a "oubliés" dans les médias...
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